CINQUIÈME PAROLE
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Après cela, Jésus, sachant que toutes choses étaient déjà accomplies, dit :
"J'AI SOIF"
(Jean 19.28)
Trois mots très courts qui expriment la souffrance intense du Sauveur sur la croix.
"Ma vigueur est desséchée comme un têt d'argile, et ma langue est attachée à mon palais" lit-on au Psaume 22.15.
"Je suis las de crier ; mon gosier est desséché ; mes yeux se consument, pendant que j'attends mon Dieu" (Psaume 69.3).
Celui qui a désaltéré tant d'âmes assoiffées a soif. Il avait déclaré : "Si quelqu'un a soif, qu'il vienne à moi et qu'il boive..." (Jean 7.38), "Celui qui croit en moi n'aura jamais soif" (Jean 6.35), et il dit : "J'AI SOIF"!
LA TOISON (Juges 6.36 à 40)
Gédéon demanda un jour un signe à Dieu : "Si tu veux sauver Israël par ma main comme tu l'as dit, voici, je mets une toison de laine dans l'aire : si la rosée est sur la toison seule, et que la sécheresse soit sur toute la terre, alors je connaîtrai que tu sauveras Israël par ma main". Et il arriva ainsi. Le lendemain matin, Gédéon pressa la toison et en recueillit la rosée, une coupe pleine d'eau. Puis il demanda à Dieu un autre signe : "Encore une seule fois, je te prie, je ferai un essai avec la toison ; je te prie, qu’il n’y ait de la sécheresse que sur la toison et que sur toute la terre, il y ait de la rosée". Et Dieu fit ainsi cette nuit-là : la sécheresse fut sur la toison seule, et sur toute la terre il y eut de la rosée.
Durant sa vie, Jésus a été la toison couverte de rosée sur une terre desséchée, dans un monde aride où rien ne désaltère l'âme. "Quiconque boit de cette eau-ci (l'eau que la terre produit) aura de nouveau soif, a-t-il dit ; mais celui qui boira de l'eau que je lui donnerai, moi, n'aura plus soif à jamais ; mais l'eau que je lui donnerai, moi, sera en lui une fontaine d'eau jaillissant en vie éternelle" (Jean 4.14). Cette toison a été "pressée" pour donner une coupe pleine d'eau. Sur la croix, Jésus a été la toison sèche pour que toute la terre puisse être abreuvée de la rosée du ciel.
LE ROCHER (Exode 17.6 et 1 Corinthiens 10.4).
Pour les Israélites qui traversaient le désert, il n'y avait point d'eau à boire, et le peuple eut soif et murmura contre Moïse qui cria à l'Eternel. Dieu dit alors à Moïse : "Passe devant le peuple et prends dans ta main la verge. Voici, je me tiens devant toi, sur le rocher, en Horeb. Tu frapperas le rocher, et il en sortira des eaux, et le peuple boira". L'apôtre Paul écrira plus tard : "Tous, ils ont bu du même breuvage spirituel, car ils buvaient du rocher spirituel qui les suivait : et le rocher était le Christ".
Comme le rocher fut frappé pour donner ses eaux que le peuple put boire pendant toute la traversée du désert, ainsi Christ est frappé de Dieu pour que nous puissions, nous, boire de l'eau de la vie et avoir la vie éternelle.
Le prophète Esaïe nous dit : "(Christ) a été frappé de Dieu et affligé ; il a été blessé pour nos transgressions, il a été meurtri pour nos iniquités ; le châtiment qui nous donne la paix a été sur lui, et par ses meurtrissures, nous sommes guéris" (Esaïe 53.4-5). Ce même prophète écrit : "Ho ! quiconque a soif, venez aux eaux..." (Esaïe 55.1).
C'est de celui qui, sur la croix, a soif que coule dès lors la source de la vie, la fontaine d'eau inépuisable à laquelle chacun peut boire gratuitement. "Que celui qui a soif vienne, que celui qui veut prenne gratuitement de l'eau de la vie" (Apocalypse 22.17).
Jésus avait déjà eu soif dans sa vie. Il était un homme comme nous, à part le péché, et il a été, en toutes choses, rendu semblable à ses frères (Hébreux 2.17). Il a connu la fatigue, la faim et la soif. Nous le voyons, lassé du chemin, assis sur la fontaine de Sichar demandant à une femme samaritaine de lui donner à boire. Il faut bien faire la différence entre la soif physique et la soif spirituelle. Jésus, ayant soif physiquement, se trouve en présence d'une femme ayant besoin d'un breuvage spirituel que lui seul peut donner. Jamais Jésus n'a eu soif spirituellement, cela se comprend, tandis que sur la croix, à la fin des trois heures d'abandon, après avoir supporté le châtiment de nos nombreux péchés, Jésus a soif. Il s'agit d'une soif physique, sans aucun doute, mais aussi d'une soif spirituelle. Il a soif de retrouver sa communion avec son Dieu. "Comme le cerf brame après les courants d'eau, ainsi, mon âme crie après toi, ô Dieu !" avait-il dit par l'esprit prophétique, au Psaume 42. "Mon âme a soif de Dieu, du Dieu vivant. Quand viendrai-je et paraîtrai-je devant Dieu ?"
Si Jésus a bu du torrent dans le chemin (Psaume 110.7), il en boit aussi sur la croix : Quel rafraîchissement pour son âme angoissée lorsqu'il peut dire au brigand repentant : "Aujourd'hui, tu seras avec moi dans le paradis", et lorsqu'il voit sa mère, avec quelques femmes, et le disciple qu'il aime, se tenir près de la croix. Mais durant les heures sombres pendant lesquelles il expie nos péchés, pas une goutte d'eau ne vient rafraîchir sa langue attachée à son palais, aucune consolation pour son âme altérée de laquelle Dieu se tient éloigné.
Telle sera la soif de celui qui n'aura pas accepté l'eau de la vie que Jésus donne; et il en sera le prisonnier tributaire durant l'éternité. L'histoire du riche et de Lazare (Luc 16.19-31) nous en donne un aperçu : Après leur mort, le riche s'écriait : "Père Abraham, aie pitié de moi, et envoie Lazare, afin qu'il trempe dans l'eau le bout de son doigt, et qu'il rafraîchisse ma langue, car je suis tourmenté dans cette flamme". Mais Abraham dit : "Mon enfant, souviens-toi que tu as reçu tes biens pendant ta vie, et Lazare pareillement les maux ; et maintenant, lui est consolé ici, et toi, tu es tourmenté. D'ailleurs, un grand gouffre est fermement établi entre nous et vous, en sorte que ceux qui veulent passer d'ici vers vous ne le peuvent, et ceux qui veulent passer de là ne traversent pas non plus vers nous". Après la mort, il est trop tard. La miséricorde divine n'a plus cours : dans ce lieu ténébreux, même une goutte d'eau est refusée à celui qui n'a pas voulu boire auparavant au fleuve de la grâce. Mais ce fleuve coule aujourd'hui encore à grands flots.
Au pied de la sainte croix
Jaillit la fontaine
Du salut que je reçois,
Grâce souveraine !
O Sauveur, Rédempteur,
C'est dans le sang de la croix
Que je me confie.
Arrivés au lieu appelé Golgotha, les soldats romains avaient donné du vinaigre mêlé de fiel à Jésus ; mais celui-ci l'ayant goûté n'avait pas voulu le boire (Matthieu 27.33-34). Cette boisson était donnée aux condamnés pour les insensibiliser quelque peu pendant leur supplice. Jésus l'avait refusée, car il voulait supporter à part entière et consciemment les douleurs qui allaient être les siennes. Mais lorsqu'il dit : "J'ai soif", il accepte le vinaigre que les soldats lui présentent sur une éponge, parce qu'il sait que toutes choses sont déjà accomplies.